POURQUOI NOUS ASSIGNONS LE SYNDEAC ET 15 CDN

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9 Janvier 2017

Dans un communiqué daté du 4 janvier le SYNDEAC déclare : « l’emploi des artistes est plus que jamais la priorité naturelle des directions des Centres dramatiques. » En vérité, c'est parce que le volume d'emploi des Artistes interprètes, que sont tenus de respecter les Centres dramatiques nationaux (CDN), a atteint un déficit considérable au cours des 10 dernières années, que le SFA et la Fédération CGT du spectacle ont assigné il y a plus d'un an le SYNDEAC et 15 CDN devant le Tribunal de Grande Instance. L'accord relatif aux artistes interprètes dans les CDN, signé par le SYNDEAC en 2003, est annexé à la convention collective nationale des entreprises artistiques et culturelles. La CFDT et FO se sont joints à cette assignation.

Le SFA et la Fédération du Spectacle CGT ont déjà expliqué publiquement que plusieurs centaines de milliers d’heures avaient manqué ces dernières années aux comédiennes et comédiens vivant dans notre pays, soit plus de 4500 mois de travail (1 an de travail pour 375 comédiennes et comédiens) ! Bagatelle. Pendant plus de dix ans, sans relâche, nous nous sommes battus pour améliorer l'application de l'accord de 2003, la veille de l'assignation encore... et sur la vitrine du SYNDEAC, toujours le même panneau "Demain on rase gratis"... et nos barbes ont poussé. La situation n’était plus tolérable.

Aujourd'hui, avec un art consommé du retournement, le SYNDEAC s'emploie à présenter la situation "catastrophique" dont des CDN seraient victimes par suite de l'assignation, occultant ainsi toute responsabilité des directeurs de CDN et du SYNDEAC lui-même. C'est une falsification pure et simple de la réalité qu'il est nécessaire de rétablir. Pour n'être pas nouvelle, cette présentation de l'histoire sans la moindre référence à l'Histoire justement relève d'une conception de l'information que nous ne partageons pas et que nous combattons partout où elle est à l'œuvre. Venant d'une organisation dont certains membres sont des artistesdirigeant des entreprises chargées de missions d'intérêt général, on serait en droit d'attendre moins de traficotage et un peu plus de rigueur intellectuelle.

 

Mais revenons aux explications données il y a un an déjà. Et d'abord ce rappel : notre action s'inscrit dans la défense des missions des CDN dont la première est de créer, produire et coproduire des œuvres dramatiques en direction des publics les plus larges. Il n'y a pas de théâtre sans comédiens. Ce n'est pas une déclaration théorique, une affirmation emphatique pour la galerie, c'est l'évidence d'une réalité concrète, le crédo qui fonde notre action : Notre bataille pour l’emploi des artistes interprètes est tout à fait indissociable de celle pour la pérennisation des missions de service public d’intérêt général des CDN.

Ce sont pour des raisons analogues que, devant le délabrement et le non-respect, déjà, d'un premier accord sur l'emploi des artistes interprètes dans les CDN datant de 1975, que le SFA avait assigné le SYNDEAC en 1999. Le présent accord de 2003 est né de cette assignation-là. Nous sommes fidèles à notre combat, le SYNDEAC est fidèle au sien, reconnaissons-lui ce mérite.

Selon l’organisation patronale et certains directeurs, le SFA et la CGT ainsi que les autres syndicats qui se sont joints à la procédure seraient responsables de la situation "catastrophique" en réclamant près de 8 millions d’Euros à une quinzaine de CDN. Ils prétendent que des entreprises seraient menacées de fermeture et que les personnels technique et administratif risquent d’être licenciés suite à notre action en justice. Pourtant ils n'ont pas attendu l'assignation, cela fait longtemps que nombre de CDN externalisent de nombreux postes et services et demandent aux salariés de faire autant avec moins de moyens, appliquant une politique qui ressemble fort au libéralisme qu'ils dénoncent par ailleurs. Dresser les salariés les uns contre les autres en maniant le chantage et le mensonge est une très mauvaise guerre menée par des apprentis sorciers.

Mais, à y regarder de près, il y a une certaine cohérence entre ces autoproclamés-défenseurs-de-l’emploi-des-artistes et ceux qui n’ont pas trouvé un mot pour défendre le métier d’acteur, de chanteur, de danseur et de circassien professionnels face à la volonté destructrice du gouvernement de permettre l'engagement de bénévoles dans des spectacles exploités commercialement.

C'est seulement en regardant l'Histoire en face que, après que Justice soit passée, nous trouverons les moyens de construire ENSEMBLE, dans le respect de chacun, le théâtre public sur des bases saines.