Audiovisuel : orientations 2009-2012

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Article issu du document d’orientations - Plateaux 197 - 2e trimestre 2009

Cinéma et audiovisuel

Les différents secteurs d'activité couverts par ce titre « cinéma-audiovisuel » ne sont pas ceux qui sont le plus pratiqués par nos adhérents et par les artistes interprètes en général dans le pays. Ce sont le plus souvent des secteurs spécifiques pratiqués par des artistes relevant d'un bassin assez restreint (doublage, radio…).

Pour autant le SFA ne doit pas s'en désintéresser car les nouvelles technologies ouvrent des perspectives nouvelles de créativité, en particulier dans les formats techniques et les formes d'expression.

Dans ces secteurs -et nous le soulignions déjà il y a trois ans- il est souvent difficile d'entreprendre des négociations avec des groupements d'employeurs soit inexistants, soit mal identifiables, soit relevant de groupes multinationaux, afin d'essayer de conclure des accords collectifs permettant aux artistes interprètes d'exercer leur art et leur métier dans des conditions acceptables.

Ces secteurs relèvent autant du code du travail que de celui de la propriété intellectuelle et les détenteurs des droits de ces oeuvres ou programmes sont parfois difficiles à identifier. Si cela concerne les nouveaux secteurs comme l'animation 3D, le multimédia et les jeux vidéo -image et son- et maintenant les programmes créés pour (et/ou diffusés sur) Internet ou les téléphones mobiles, nous devons continuer d'essayer d'établir des conventions (ou des modèles de contrats si des négociations d'accords collectifs s'avèrent impossibles) dans des domaines plus anciens comme les films d'entreprise ou les enregistrements de spectacles vivants de toutes disciplines.

Enfin, dans tous les secteurs auxquels les régions commencent à s'intéresser de près, comme le cinéma, la fiction télévisuelle, le court métrage ou la publicité, le SFA et ses sections régionales en premier chef, doivent être vigilants sur les conditions d'emploi et de rémunération des artistes interprètes locaux. Nous reprenons ce que nous écrivions il y a trois ans : « les artistes interprètes vivant en régions sont le plus souvent les parents pauvres des castings ». Nous devons revendiquer une véritable création décentralisée avec des moyens.

Nous continuons de demander que les aides financières ou parts de coproductions des régions à ces programmes et oeuvres soient subordonnées à un respect du code du travail et de celui de la propriété intellectuelle -et des conventions collectives lorsqu'elles sont applicables- ainsi qu'à une prise en compte plus importante du volume d'emploi de ces artistes vivant et travaillant hors de la région Ile de France.

Convention collective et accord spécifique

La CMP cinéma, qui s'est mise en place sous l'égide du ministère du Travail il y a plus de trois ans, continue son travail et la partie « acteurs » est en négociation. L'avantage de cette révision de la convention de 1967 est qu'elle devrait aboutir à une signature par plusieurs syndicats de producteurs (il y a en a cinq à l'heure actuelle) et par une extension du texte, alors qu'actuellement elle n'est opposable qu'aux membres de l'APC (Association des producteurs de cinéma, ex « Chambre syndicale des producteurs de films »). Le seul gros problème que le SFA entrevoit n'a pas encore été évoqué : celui de la définition de ce que recouvre le cachet initial. Quelle part de fixation ? Quel droit d'autorisation d'exploitation ? Quelles rémunérations pour quels modes d'exploitation ?

Quant à « l'accord spécifique concernant les artistes interprètes engagés pour la réalisation d'une oeuvre cinématographique », nous sommes actuellement complètement en panne, et ce depuis plus de deux ans. Ainsi les négociations ouvertes fin 2005 ont fait long feu… quelques mois après.

Sur la base du bilan de l'accord et des simulations faites par l'ADAMI sur les propositions des producteurs de 2006, nous relançons une demande de négociation en vue de la révision de l'accord. Une mission a été confiée par le CNC à René Bonnell en avril 2008 « visant à clarifier des notions essentielles dans la gestion et l'exploitation commerciales des films telles que le coût de production d'un film, son amortissement ou bien encore les recettes nettes producteur »… Le rapport final n'a que peu, trop peu, traité des droits des artistes interprètes, au bénéfice des auteurs, mais il a lancé une vague piste de travail que nous avons également explorée.

  •  Notre premier but est qu'un nombre plus important de films engendre des rémunérations pour les artistes sur les différentes exploitations des oeuvres ;
  •  Le deuxième est que la hauteur des rémunérations soit meilleure que dans l'accord actuel ;
  •  Le troisième est que tous les modes d'exploitation des oeuvres ouvrent des droits aux artistes, y compris Internet (vidéo à la demande en particulier). Ainsi la notion « d'amortissement du coût du film » à partir duquel les artistes sont rémunérés doit être abolie. Cette négociation sera très difficile.

Court métrage

Tout reste à faire sur le plan conventionnel. Le chantier ouvert par le CNC en 2006 n'a débouché sur rien dans le domaine du respect du droit du travail et de la propriété intellectuelle, sauf pour les courts métrages subventionnés par le CNC. Les courts métrages aidés par les régions devraient également respecter le droit du travail et du code de la propriété intellectuelle, mais nous n'avons pas la preuve.

Lieux de réflexion

Etrange paradoxe : dans ce secteur cinématographique où nous avons du mal à négocier et à obtenir des accords collectifs satisfaisants, dans ce domaine où règnent une grande dispersion des employeurs et une grande échelle économique des types et coûts de production, nous appartenons à des regroupements professionnels de filières distinctes depuis plusieurs années.

Ainsi en est-il du BLOC (Bureau de liaison des organisations du cinéma) qui regroupe les « indépendants » du long métrage et dont le SFA a été créateur au moment de l'épineux dossier AMI (Accord multilatéral sur les investissements). Le SFA continuera de participer à cette association, tant qu'elle aura la possibilité de garder son autonomie. Ainsi les décisions du BLOC doivent-elles être prises à l'unanimité, sinon le BLOC ne peut pas signer en tant que tel. Il faudra cependant être vigilant afin de ne pas servir d'alibi ou de « vitrine artistique » aux associations de producteurs en particulier. Nous devrons nous servir de ce levier pour obliger les producteurs à conclure des accords collectifs équilibrés.

Nommés par arrêté ministériel, les représentants du SFA (en fait « représentants des acteurs ») à la commission d'agrément du long métrage du CNC font régulièrement leur travail et le continueront, car cette assemblée est un lieu de pédagogie. Les représentants des salariés peuvent y faire passer une partie de leurs convictions en matière de respect du droit du travail et de la propriété intellectuelle (pour ceux que cela concerne), envers les producteurs largement représentés et le personnel du CNC, alors que cette instance n'existe que pour contrôler le respect de la réglementation du cinéma, inscrit dans le « code de l'industrie cinématographique ».

Ainsi le SFA a demandé que le CNC s'adresse aux régions pour leur rappeler que l'octroi d'aides, de subventions ou de parts de coproduction, était soumis au respect par les producteurs des codes du travail et de la propriété intellectuelle et que des contrôles devraient être effectués.

Dans le court métrage s'est créé le ROC (Regroupement des organisations du court métrage) au moment où nous espérions pouvoir engager des négociations de convention collective dans ce secteur. Nous devons trancher la question : outre le fait que nous n'avons pas eu assez de militants pour suivre les réunions, nous nous posons la question de notre appartenance en 2009 à cette association, plus intéressée par les problèmes de diffusion (festivals, télévisions) que de conditions d'emploi.

Télévision

Le secteur est en mouvement perpétuel. Avec les signatures d'accords expérimentaux pour la vidéo à la demande et pour les rediffusions de fictions en journée, qui arriveront à leur terme fin 2010, nous devrons décider si ces accords doivent être prolongés ou non et dans quelles conditions financières.

Nous entamons un nouveau cycle de négociations sur différents articles de la convention actuelle que nous avons constatés désuets ou non appliqués : ainsi en est-il des enregistrements de spectacles vivants pour la télévision, des conditions de sortie de téléfilms en salles de cinéma (sorties prévues ou non prévues lors de la signature du contrat initial).

Enfin n'oublions pas que le tout numérique doit arriver fin 2011, c'est-à-dire demain, et que notre convention collective -où les droits sont établis à partir de la première diffusion sur une chaîne hertzienne analogique- va «tomber » d'elle-même. Par ailleurs, il faut déterminer dans quelles conditions les nouveaux diffuseurs et nouveaux diffuseurs/producteurs seront intégrées dans la convention.

Nouveau chantier : les productions pour Internet

Bien qu'il ne s'agisse pas de productions pour la télévision, c'est avec l'USPA (Union syndicale de la production audiovisuelle) principale signataire de la convention télévision, que nous entreprenons une négociation. Sans aucun doute les producteurs « télé » diversifient aussi leurs activités vers Internet et le téléphone mobile. Tout est à inventer dans ce domaine.

Accord archives de l'INA

L'accord Télévision fonctionne, un expert comptable nommé par les syndicats va faire des « sondages » pour vérifier sa bonne application. Toutefois, le SFA continuera d'oeuvrer pour que cet accord important soit géré par l'ADAMI.
L'ADAMI et l'INA se sont rencontrés à plusieurs reprises et la situation antérieure s'est apaisée. Reste l'opposition de certains syndicats minoritaires d'artistes interprètes à la gestion de cet accord par l'ADAMI.

L'accord Radio fonctionne également, malgré une menace constante de procédure par la SPEDIDAM.

Captation de spectacles vivants

Tout ou presque reste à établir et les secteurs sont différents. Il ne faudrait pas que des conditions par trop dissemblables soient établies séparément dans les diverses conventions collectives du spectacle vivant. Déjà nous avons le mauvais exemple du contrat établi unilatéralement par la COPAT (groupement d'employeurs du spectacle vivant qui a créé sa société de productions audiovisuelles dans ce but unique).

Nous avons dit que les conditions qui existent encore dans la convention collective télévision étaient à revoir, du fait que la première destination d'exploitation n'est plus forcément la télévision, mais nous ne lâcherons pas la proie pour l'ombre et souhaitons l'ouverture d'une large négociation comprenant non seulement les producteurs audiovisuels spécialistes des « captations » mais aussi les représentants des divers utilisateurs, ainsi que les employeurs du spectacle vivant de toutes disciplines (théâtre, danse, variétés, etc.) qui emploient les artistes interprètes que le SFA représente.

Il serait souhaitable d'avoir aussi à nos côtés le SNAM, car les spectacles emploient souvent des artistes représentés par nos deux syndicats. Si ceux-ci travaillent ensemble sur les conventions collectives du spectacle vivant et du secteur phonographique, il n'en est pas de même dans les secteurs audiovisuels et cinématographiques.

Radio France

Nous relançons le dossier salaires, bloqué depuis juillet 1997. Faute de militants pour s'en occuper, mais également en raison de mesures discriminatoires à l'égard de syndicalistes, les suites à donner à notre dernière lettre RAR à la direction est restée à cette date sans aucune réponse. Une assignation a été décidée, car il faudra bien sortir de cette illégalité.

En ce qui concerne les diffusions sur le site de programmes comportant des prestations d'artistes interprètes en « podcast », malgré un courrier de 2007 de la direction annonçant l'ouverture d'une discussion, tout reste à faire.

Doublage et animation

La convention sur les droits des artistes interprètes dans leur activité de doublage (DAD-R) est en cours de renégociation, ayant été signée pour une validité de quatre ans, jusqu'à fin 2008. Il faut surtout prendre en compte les modes d'exploitation devenus courants depuis la rédaction du texte d'origine, mieux cerner le processus d'acquisition des droits postérieurement à la signature du contrat initial et trouver un moyen pour que la libération des droits ne soit pas effective avant le paiement intégral des rémunérations dues à l'artiste.

L'accord national sur les salaires dans ce secteur, intégré depuis dans la convention collective des prestataires techniques, doit aussi être renégocié avec une chambre syndicale unique, minoritaire en nombre d'entreprises mais puissante en surface économique, en même temps que croît le nombre de petits studios proposant du travail au rabais.

Nous devrons nous battre pour maintenir, voire améliorer, le niveau de nos salaires et revoir -en fonction de la « révolution numérique » en cours, autant dans les moyens et modes de diffusion qu'en nos outils de travail- les divers paramètres déterminant notre rémunération. Il faudrait enfin trouver les outils nécessaires pour résoudre le problème incessant des retards de règlement des salaires.

La création de voix pour les dessins animés d'initiative française reste un terrain vierge conventionnellement pour les artistes interprètes, le syndicat de l'animation ignorant depuis trois ans notre demande d'une négociation, ne serait-ce que pour rédiger des clauses miroirs entre l'accord doublage et la convention de l'animation pour les artistes.

Multimédia et jeux vidéos

Malgré l'importance de ces secteurs dans la production et la prestation en France, depuis plusieurs années il semble quasiment impossible d'ouvrir des négociations pour une protection conventionnelle. Ceci est du en partie à la multiplicité économique des acteurs (éditeurs, studios de production, prestataires), en partie à la mauvaise foi des acteurs structurés répertoriés. Il faudra trouver les moyens de faire intervenir le CNC qui a du personnel dédié à ces secteurs. Il faut négocier des accords de travail et de propriété intellectuelle pour les interprètes apparaissant à l'image et reconnaissables, pour ceux qui apparaissent transformés par l'informatique et donc méconnaissables, pour ceux prêtant leur physique pour l'animation ainsi que pour ceux qui fournissent les voix, que ce soit dans la production ou dans la localisation.

Publicité

Dans le domaine de la publicité audiovisuelle, il faudrait établir une véritable protection conventionnelle concernant les conditions de travail et les salaires, et rendre obligatoire la grille existante pour les exploitations. Le fait que la publicité soit intégrée dans la convention collective cinéma nous donne une ouverture, mais sans mobilisation des artistes, des avancées sont peu probables. Dans le domaine des voix publicitaires (pour télévision, cinéma, radio, Internet, téléphone…), malgré le contrat d'exploitation établi unilatéralement par les employeurs après deux ou trois contacts avec le SFA, nous devrons tenter d'améliorer la situation en ce qui concerne le salaire d'enregistrement et les rémunérations pour les exploitations.

Couverture conventionnelle des activités de formation d'enseignement et d'animation

Le précédent congrès avait voté une motion dans laquelle était souligné « le caractère spécifique et nécessaire de ces pratiques dans l'activité professionnelles des artistes interprètes », et qui demandait au conseil national de continuer le travail de réflexion sur ces questions afin d'en dégager des propositions de couverture conventionnelle. Il est donc urgent de reprendre le travail où nous l'avons laissé.

 

En conclusion de ce chapitre, il faut insister sur le fait que si les artistes interprètes et/ou leurs agents n'ont pas à coeur de faire respecter les accords et conventions collectives que le SFA discute et signe, nous n'arriverons jamais à en faire améliorer les contenus. Malheureusement nous avons de nombreux exemples dans ces secteurs. Et si la responsabilité en incombe au premier chef à une partie des employeurs qui essaie de contourner textes et lois, elle en revient aussi aux artistes.

 

CMP : Commission mixte paritaire. Employeurs, salariés, ministère
ADAMI : Société civile pour l'administration des droits des artistes et musiciens interprètes
CNC : Centre national de la cinématographie
INA : Institut national de l’audiovisuel
SPEDIDAM : Société de perception et de distribution des droits des artistes interprètes de la musique et de la danse
SNAM : Syndicat national des artistes musiciens CGT