Alors que se déroule l’Euro 2016, le Syndicat français des artistes interprètes a alerté les services de l’inspection du travail au sujet du recours à des danseurs « bénévoles » pour les spectacles d’inauguration et de clôture au stade de France. Est-il normal que pour des événements dont le coût se chiffre à plusieurs millions d’euros, l’UEFA et ses sous-traitants fassent appel à des « volontaires danseurs, danseuses, Cancan, classiques » (pour reprendre les termes de l’offre de casting diffusé sur des sites professionnels) sans leur proposer, en contrepartie, la rémunération qui se doit ? Est-il normal que des artistes se produisent sans être rémunérés alors que le prix des places oscille de 75 à 895€ ?
Depuis plusieurs mois, le SFA est mobilisé pour la défense de la présomption de salariat des artistes interprètes, gravement menacée par l’article 11A du projet de loi « liberté de création, architecture et patrimoine », et qui vient d’être votée en toute dernière lecture au Sénat. Depuis 1969, les artistes interprètes, grâce à l’article L7121-3 du code du travail, sont reconnus comme étant des salariés, liés par un contrat de travail à un employeur. De cet article et du statut de de salarié découlent l’obligation d’un contrat de travail, une rémunération conforme aux conventions collectives en vigueur ainsi que les droits sociaux des artistes interprètes (sécurité sociale, assurance chômage, formation professionnelle, retraite, …) et éventuellement leurs droits de propriété intellectuelle. L’article 11A, qui légalisera les pratiques peu scrupuleuses de certains producteurs de spectacle, viendra remettre en question tout l’édifice de protection sociale des artistes interprètes.
De plus, la convention nationale de partenariat pour la lutte contre le travail illégal dans le spectacle vivant et le spectacle enregistré, signée en 1997, déclare que « Le secteur du spectacle est gravement perturbé par des pratiques de travail illégal et plus particulièrement de travail dissimulé qui fausse le jeu normal de la concurrence et portent atteinte à l’ordre public social ainsi qu’à la protection des droits des salariés ». Dès lors, nous ne comprendrions pas que les pouvoirs publics tolèrent que l’UEFA et ses sous-traitants portent atteinte à « l’ordre public social ».
Alors que de plus en plus d’artistes se retrouvent dans une situation précaire, alors que le secteur du spectacle vivant est de plus en plus sinistré, la tolérance zéro doit s’appliquer pour ce genre d’événements qui, s’ils respectaient les lois en vigueur en France, créeraient de l’emploi pour des artistes qui en ont grandement besoin.