Dans l’opacité de la moiteur estivale, les cabinets ministériels se sont employés à défaire en catimini ce que des années de conquêtes sociales ont construit. Alors que la pseudo concertation avec les organisations syndicales a démarré il y a plusieurs semaines, le contenu exact des ordonnances ne sera rendu public que le 31 août. Nous savons toutefois que leur but est de réduire ce qu’ils appellent « le coût du travail ». Les diverses mesures gouvernementales sont prises au nom de la reprise de l’emploi. C’est loin d’être avéré si l’on observe les effets des précédentes réformes du Code du travail qui n’ont pas permis de résoudre le chômage de masse. Par contre, elles viendront fragiliser davantage encore celles et ceux qui tirent leur seule « richesse » du travail, quand ils en ont un. Appauvrir davantage les travailleurs, supprimer les « conquis » de la négociation et des luttes sociales, c’est rendre l’avenir plus incertain encore pour des millions d’entre nous.
La procédure choisie pour défaire d’un cran supplémentaire les règles du Code du travail en dit long sur les intentions du gouvernement actuel. Dans nos secteurs du spectacle, du cinéma et de l’audiovisuel, nous avons toutes les raisons de nous inquiéter lorsqu’il est annoncé :
- La suppression des cotisations salariales chômage et maladie annonce un déficit encore plus grand des caisses sociales. Elles seront remplacées par une hausse de la CSG. Ce transfert à l’impôt aura également pour effet de réduire le pouvoir d’achat des retraités. De plus, alors que la hausse de CSG est bien prévue pour janvier, les suppressions de cotisations sont déjà en partie différées.
- Le démantèlement des conventions collectives, alors qu’elles sont le seul socle légal permettant des conditions de travail, de salaires, de majorations meilleures que ce que prévoit le Code du travail. Dans nos secteurs, où la négociation collective n’est pas obligatoire dans 90% des entreprises, elles sont fondamentales pour garantir les droits des salariés ;
- La possibilité de remise en cause à la baisse de tous les accords d’entreprise antérieurs ;
- La mise en place de contrats de chantiers ou « d’émissions », qui permettraient aux employeurs de licencier artistes et techniciens en fin de projet, et leur offriront une sécurisation face à tout recours de requalification en CDI ou en cas de licenciements abusifs ;
- La fusion automatique des instances représentatives du personnel dans les entreprises de moins de 500 salariés conduirait à la suppression des Comités d’Hygiène, Sécurité et Conditions de Travail, qui ont un rôle prépondérant notamment en matière de prévention, de harcèlement, sécurité et santé au travail ;
- Le plafonnement des indemnités prud’homales inciterait les salariés concernés à négocier à la baisse plutôt que de faire valoir leurs droits devant la justice en cas de licenciement abusif ;
- Des référendums pourraient être organisés unilatéralement par les employeurs afin de contourner les syndicats lors des négociations dans les entreprises (salaires, temps de travail…) ; les plus contestataires sont évidemment dans le viseur…
La liste est longue de ce que les mesures gouvernementales actuelles changeraient de notre quotidien, en matière de droits essentiels comme le travail, la santé, le logement, la retraite… Sans compter la future réforme de l’assurance-chômage, qui pourrait tout à fait remettre en cause les annexes 8 et 10, ou une autre concernant la formation professionnelle, qui aurait des impacts sur l’Afdas, ou encore sur le budget 2018 de la Culture, qui subirait sans nul doute des coupes claires.
Pourrons-nous continuer à vivre de nos métiers ? Seule une mobilisation de grande ampleur mettra un terme aux régressions prévisibles.