Lors des Bis de Nantes qui se sont déroulés les 22 et 23 janvier derniers, les professionnel·le·s ont exprimé devant Franck Riester, ministre de la Culture, leur opposition au projet de réforme universelle des retraites et au plan de démantèlement de l’État qui est actuellement conduit dans le périmètre de notre ministère (transformation du ministère, loi dite « 3D » - déconcentration, décentralisation, différenciation).
Lundi 27 janvier 2020, une réunion technique réunissant les organisations syndicales représentatives et patronales du secteur s’est tenue au ministère des Affaires de la Sécurité sociale, en présence de la Direction Générale de la Création Artistique (DGCA) et de conseillers au cabinet du secrétaire d’État aux retraites.
Pour la première fois depuis le début des concertations sur la réforme des retraites, nous avons pu nous exprimer sur la base d’un texte, le projet de loi et une étude d’impact générale ayant finalement été présentés devant le Conseil des ministres le 24 janvier 2020.
Ce projet de loi souffre de nombreuses critiques puisque le Conseil d’État, lui-même, dénonce une étude d’impact insuffisante, le caractère lacunaire des projections financières, ou encore reproche au Gouvernement de ne pas répondre « aux exigences générales d’objectivité et de sincérité ».
Pour le secteur du spectacle, le gouvernement prend le risque de la paupérisation. Depuis des décennies, les artistes auteurs et artistes du spectacle bénéficient des mêmes droits à la retraite que les autres salarié·e·s du régime général en ayant des taux de cotisations différents. Ce système, basé sur la solidarité professionnelle, fonctionne et permet de répondre à leurs spécificités.
Avec la mise en place de la réforme des retraites, au nom d’un universalisme revendiqué comme un dogme, le pacte social existant depuis 1975 pour les artistes du spectacle et les artistes auteurs est rompu.
Dans ce régime universel par points, les artistes auteurs ne peuvent espérer bénéficier d’une retraite que si l’État prend à sa charge le financement de points supplémentaires. Quant aux artistes du spectacle, le projet prévoit l’annulation de leurs taux réduits de cotisations de retraite, une mesure qui devra également être compensée par l’État pendant une durée maximale de 15 ans. Qu’en sera-t-il ensuite pour les auteurs, pour les artistes du spectacle et pour les entreprises qui les emploient ?
Ces mesures, évaluées respectivement à 350, et 50 millions d’euros par an durant 15 ans, fragilisent gravement le budget et le périmètre d’action du ministère de la Culture. Elles pourront en outre être remises en cause à chaque loi de finances menaçant ainsi les droits des artistes ou les crédits affectés à la création.
Les craintes que nous avons exprimées sur la prise en compte des périodes d’assurance chômage par le régime universel de retraite ne sont pas levées. Les périodes de chômage non indemnisés ne permettent pas d’acquérir des points. Quant aux périodes indemnisées, aucun éclaircissement n’a été apporté sur le plafonnement des points accordés au titre des « périodes de solidarité » ou sur le changement d’assiette de calcul des droits des salariés intermittent. Quant à l’étude d’impact sur la retraite des travailleurs du spectacle que nous réclamons depuis longtemps, on nous a opposé l’impossibilité d’en produire une sur un panel représentatif.
Parallèlement, alors que l'on nous dit que l'universalité est la clé de voûte de la réforme, le gouvernement prétend toujours amputer la protection sociale et la retraite des artistes du spectacle en maintenant l'abattement de leur assiette de cotisation que rien ne justifie.
- RIEN sur ce qui se substituera aux régimes spéciaux de l’Opéra national de Paris et de la Comédie Française et qui serait adapté aux spécificités de ces professionnels ;
- RIEN sur les carrières hachées des artistes et des intermittents ;
- RIEN sur les autres travailleurs du spectacle sinon une réforme qui baissera considérablement leurs pensions ;
- RIEN sur l’usure professionnelle que subissent nombre d'artistes et travailleurs du spectacle.
Aucune proposition n’est sur la table ni de la part du gouvernement ni de la part du ministre de la Culture. La paupérisation guette le secteur culturel et l'ensemble des artistes.
Franck Riester, s’engage à chacun de ses discours à mettre les artistes au cœur de son action. Pour l'instant, avec l'ensemble des intermittent·e·s du spectacle, ils sont une des catégories qui ont le plus à perdre dans la réforme des retraites.
Notre opposition à la réforme n'en est que renforcée et nous continuerons à exiger son retrait dans le cadre des mobilisations qui se développent depuis deux mois dans tout le pays et dans tous les secteurs d'activité.
Communiqué de l’Intersyndicale Culture - constituée de la Fédération CGT du Spectacle (FNSAC CGT), de la Fédération des Arts, du Spectacle, de l’Audiovisuel et de la Presse (FASAP-FO) et de la Fédération Culture Communication Spectacle (FCCS CFE-CGC)