À la lecture du Dauphiné Libéré du 17 avril 2018, le SFA prend connaissance avec indignation de l’initiative de quelques directeurs de théâtres avignonnais de créer une seconde association, l’AF&T, qui entend s’opposer à la politique de professionnalisation que mène depuis plusieurs années l’association AF&C dans le festival OFF d’Avignon.
Les quelques citations parues dans l'article jettent quelque lumière sur leurs motivations réelles et obligent notre syndicat à réagir avec force. Laisser entendre par exemple que l'application de la législation du travail et des droits sociaux des artistes interprètes est « une mission politique dangereuse » a quelque chose d’indécent.
M. Le Corff, un des leaders de AF&T, « pointe du doigt » entre autres « la relâche d'une journée par semaine imposée aux compagnies » en omettant courageusement de signaler que cette journée « imposée » est en fait l'application du repos hebdomadaire obligatoire interdisant de faire travailler un salarié plus de six jours consécutifs par semaine (Article L3132-1 du code du travail). Sans doute ces directeurs considèrent-ils que certaines protections sociales, qui sont des droits pour les salariés, risquent d’affaiblir les recettes récoltées dans leurs théâtres loués à prix d’or. Ainsi voilà des hommes de culture qui souhaitent disposer de salariés corvéables à merci et cherchent des mots moins choquants pour masquer ce qui ressemblerait à de la nostalgie d'un esclavage moderne.
Les attaques du gouvernement et du patronat contre les droits sociaux des artistes interprètes ainsi que ceux des autres salariés de notre pays n'ont pas besoin d’encouragements aussi malsains et indignes.
Cette offensive idéologique de certains directeurs de théâtres à Avignon se dissimule derrière une bienveillance hypocrite : permettre « l'émergence des jeunes compagnies » et améliorer « l'économie locale ». À l'heure du désengagement du ministère de la culture, des politiques publiques et de la concentration capitalistique grandissante dans le secteur culturel, tenter de rendre les droits sociaux responsables de la précarité des jeunes artistes du spectacle ainsi que des difficultés économiques n’est pas seulement un mensonge, c'est aussi choisir le camp du patronat et de la finance contre celui des salariés. Ce n'est pas notre choix.
C'est pourquoi le SFA appelle les artistes interprètes à réagir face à de pareilles offensives libérales. Nos métiers et ceux qui les exercent ont besoin de respect et nous nous emploierons à l’imposer sans nous laisser éclabousser par l’indignité de telles initiatives et en dénonçant l'idéologie dont elles sont porteuses. Nous voulons vivre du plein exercice de nos métiers et ne pouvons tolérer qu’ils soient amputés de nos protections et de nos droits sociaux légitimes.
Il est grand temps de relever la tête et d’élever la voix.