Article paru dans Plateaux n°212 - 1er trimestre 2013
Un projet de directive a finalement été proposé en juillet 2012 par la Commission
européenne. Il en avait déjà été question il y a plusieurs années, mais le
projet était resté dans les tiroirs, entre autres à cause de l’opposition
totale des sociétés d’auteurs.
Le projet 2012 est en fait
un peu bâtard. Dans sa première partie, il propose un cadre juridique européen
aux sociétés de gestion collective, en vue de garantir la transparence de leur
fonctionnement et de leur gouvernance, en imposant certaines obligations. La seconde
partie propose des règles pour la concession de licences multiterritoriales de
droits des œuvres musicales en vue de leur utilisation en ligne dans le marché
intérieur. Cette partie ne touche, du côté des ayants droit, que les auteurs,
et dans le seul domaine musical.
Le SFA, même s’il a des
remarques à faire sur cette seconde partie, s’est surtout attaché à la première :
fondateur de l’ADAMI en 1955, il n’est pas indifférent à la vie de la société.
Dans l’ensemble, le SFA est
favorable à cette proposition de directive pour les raisons suivantes :
- garantir la
transparence du fonctionnement de la société et de sa gouvernance est un
principe fondamental qui a guidé le SFA, dès le début de l’existence de
l’ADAMI, vers une « société d’artistes gérée par les artistes » ;
il nous apparaît que l’ADAMI est dans cette voie-là ;
- la proposition
reconnaît que la gestion collective est un moyen privilégié de gestion qui
protège les intérêts des ayants droit, donc des artistes interprètes, en
établissant des règles de relations contractuelles entre les sociétés de
gestion et les utilisateurs (de toutes sortes), ce qui devrait satisfaire les
consommateurs et favoriser la diversité culturelle.
On sait combien la gestion
individuelle est déséquilibrée pour les artistes face à leurs producteurs.
Encadrer la libre concurrence est nécessaire et la proposition est bienvenue.
Au moment où ce projet va
passer dans les diverses commissions du Parlement, avant d’aboutir en plénière,
nous remarquons cependant des points négatifs :
- la définition de la « société de
gestion » est insuffisante : elle semble assimilée aux sociétés
« de services » alors qu’elle accomplit des missions d’intérêt
général, et que les services qu’elle rend sont sans but spéculatif ;
- la définition des « titulaires de
droits » est floue et doit être réservée aux seuls ayants droit visés dans
d’autres textes communautaires ou nationaux, et ne pas comprendre les
mandataires de paiement, les agents artistiques ou les managers ;
- la directive ne doit pas, sous prétexte de
régulation, détruire l’acquis dans le domaine de la gestion collective des
droits ; elle doit tenir compte de disparités nationales ;
- la directive doit tenir compte des spécificités
des secteurs d’activité comme l’audiovisuel, qu’elle semble ignorer en ce qui
concerne les accords d’exclusivité pratiqués dans ce secteur, ainsi que la
chronologie des médias ;
- deux régimes distincts devraient être établis
pour la gestion collective volontaire et pour la gestion collective
obligatoire.
Enfin, d’autres mesures
prévues concernant le fonctionnement interne des instances ne nous semblent pas
adaptées, mais nous laissons à l’ADAMI le soin de critiquer ces points-là.
Pour le moment, c’est la
commission juridique du Parlement qui traite le sujet. La députée Marielle
Gallo a organisé des auditions à Bruxelles et a publié le 4 mars un document de
travail qui va assez dans notre sens. De son côté le gouvernement français a
publié une note de cadrage à l’intention de la rapporteure le15 mars dernier.
A suivre donc, avec intérêt !
Catherine Almeras