La Ministre de la Culture vient de nommer le respecté Benjamin Stora pour mener une mission de « coordination culturelle en faveur des migrants ».
La Ministre va-t-elle demander pour autant l’annulation de la circulaire Collomb qui instaure la chasse aux sans-papiers jusque dans les centres d’hébergement d’urgence ? Ou bien va-t-elle demander aux artistes de collaborer à ces dénonciations ?
Au-delà de cette contradiction scandaleuse, la Ministre donne injonction aux artistes, aux lieux publics de mener des actions avec les migrant-e-s : c’est à la fois une première de vouloir diriger les programmations, au service d’un politique hypocrite, et une ignorance des actions déjà menées.
Depuis longtemps, et sans attendre qu’on les y autorise, de nombreux artistes ou réalisateurs ont entamé des actions. Des lieux de création ont ouvert leurs portes aux migrant-e-s, pendant que les différents gouvernements les traquent.
Dans la même logique, un comité des visas, réunissant des organisations professionnelles dont la nôtre, a été créé pour tenter d’obtenir les sésames souvent refusés malgré la production de contrats pour des tournées, des festivals, des tournages. Mais des consulats refusent ces visas, prétextant des « risques migratoires », comme pour cette jeune chanteuse africaine dont le « petit ventre » faisait penser aux cerbères qu’elle viendrait pour accoucher : voyage et concerts annulés !
Nous nous battons également depuis longtemps pour obtenir la régularisation de nos collègues confrontés à des refus de titres de séjours : la Ministre va-t-elle exiger de son homologue de l’Intérieur l’attribution des titres de séjours pour tous les migrant.e.s professionnel.le.s de la culture et toutes celles et ceux qui sont déjà impliqués dans des actions en cours ?
La Ministre va-t-elle exiger la fin des gazages à Calais, que le Président nie contre tous les témoignages ? Ou va-t-on devoir jouer de la musique pendant ces opérations illégales, en attendant de jouer des marches funèbres à la prochaine annonce de décès, en Méditerranée, dans la Vallée de la Roya, ou près du Tunnel sous la Manche ?
Faut-il que la Ministre relise la Convention Unesco pour la diversité culturelle qui stipule que les pays signataires, dont la France qui a porté le texte, s’engagent à favoriser la libre circulation des œuvres et de celles et ceux qui les réalisent ?
Nous, artistes, réalisatrices et réalisateurs, technicien-ne-s, migrant-e-s ou non, sommes engagé-e-s pour que la culture soit l’expression du partage, de la diversité, à l’opposé de tous les racismes et de toutes les répressions xénophobes.
Nous renvoyons la Ministre à ses contradictions et exigeons la régularisation et un accueil digne des migrant-e-s, en particulier de nos collègues.
Nous ne serons pas instrumentalisé-e-s pour une opération de communication visant à blanchir le gouvernement de sa politique honteuse !