Monsieur le Président de la République,
Votre gouvernement s'apprête à ratifier la convention d'assurance chômage négociée contre les intermittents, intérimaires, chômeurs en toute déloyauté.
Ce nouvel accord réduit encore une fois les droits des plus fragiles pour, nous dit-on, faire des économies parce que les chômeurs coûtent trop chers. Il faut donc trouver un moyen de les faire payer. Leur faire payer le fait qu'en France 6 chômeurs sur 10 ne sont pas indemnisés, leur faire payer les 9 millions de pauvres, travailleurs ou non, leur faire payer la situation de chômage de masse avec près de 6 millions de privés d'emploi. Ce texte fait porter sur les intermittents, intérimaires et tous les demandeurs d'emploi les 2 milliards d'économie en 3 ans que le gouvernement demande au régime d'assurance chômage.
Cet accord va aggraver la situation de tous ceux qui vivent la précarité au quotidien. Beaucoup de professions sont en danger, pas seulement les nôtres.
Avant d'arriver au pouvoir, vous avez soutenu les propositions que nous avons construites avec le comité de suivi.
Vous avez déclaré à Nantes le 19 janvier 2012 :
«Je viens parler de la culture à un moment où l'Etat, les collectivités publiques, sont dans des contraintes financières lourdes et cherchent des économies, des moyens de redresser les comptes qui ont été dégradés ou de réduire l'endettement. Mais j'affirme ici que l'austérité ne peut pas être aveugle. Un pays attractif, dynamique, enthousiaste, a plus de chance de rembourser sa dette qu'un pays que la vie a subrepticement quitté.
La crise ne rend pas la culture moins nécessaire, elle la rend plus indispensable. La culture, ce n'est pas un luxe dont, en période de disette, il faudrait se débarrasser. La culture c'est l'avenir, c'est le redressement, c'est l'instrument de l'émancipation et le moyen de faire une société pour tous. Comme le disait Baudelaire : « le meilleur témoignage que nous puissions donner de notre dignité, c'est la culture ».
Au moment où prospèrent les thèses populistes d'extrême droite (comme en attestent les propos inadmissibles de Jean-Marie Le Pen contre des artistes), la culture devrait continuer de témoigner de notre dignité, de notre « dynamisme et notre enthousiasme ».
Pourtant, dans le contexte de politique d'austérité, les budgets de la culture sont, comme bien d'autres, soumis à des coupes drastiques. Pour la première fois depuis plus de 30 ans les budgets alloués à la création, au spectacle vivant devraient être impactés. Les budgets des collectivités territoriales vont subir une ponction, par l'Etat, de 11 Milliards d'Euros ce qui aura des effets catastrophiques sur les budgets culturels.
La loi d'orientation sur la création est reportée au mieux à 2015. Dans le même temps les lois de décentralisation, adoptées avant la loi sur la création, vont déstructurer la politique culturelle de notre pays.
Le plafonnement des taxes affectées, comme celles concernant le Centre National de la Variété (CNV) ou le Centre National du Cinéma et de l'image animée (CNC) vont avoir pour effet de remettre en cause la défense et la promotion de la diversité culturelle.
Nous voulons simplement que les actes suivent les paroles.
Monsieur le Président, vous devez répondre aux dizaines d'élu-e-s de la Nation et des territoires qui demandent à M. Rebsamen, ministre du Travail de ne pas agréer l'accord assurance chômage et de rouvrir les négociations pour prendre en compte nos propositions mûrement réfléchies et partagées depuis dix ans.
Monsieur le Président, vous devez répondre aux artistes et techniciens, qui sur tout le territoire national se mobilisent, votent la grève contre cet agrément.
Monsieur le Président vous ne pouvez rester sans répondre.
Notre Fédération et ses syndicats vous demandent instamment de tenir vos engagements, de faire respecter la démocratie sociale, de ne pas sacrifier la culture et la protection sociale.
La colère, le désespoir mais surtout la détermination vont entrainer la généralisation des mobilisations et des grèves. L'objectif de ce mouvement de fond est d'obtenir avant le 18 juin, date de réunion ultime du Conseil National de l'Emploi, l'engagement du gouvernement à ne pas agréer l'accord assurance chômage et à faire rouvrir les négociations en prenant en compte, enfin, nos propositions.
Si nous n'étions pas entendus, alors ce légitime mouvement de contestation continuera de s'étendre, tout particulièrement à l'occasion des festivals et des spectacles d'été. Ce n'est pas notre souhait mais nous y serions contraints.
Monsieur le Président, nous attendons votre décision, en souhaitant qu'elle soit celle que nous demandons.
Je vous prie d'agréer, Monsieur le Président, l'expression de ma haute considération.
Denis Gravouil,
Secrétaire Général de la Cgt Spectacle.
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Courrier à François Hollande | 81.37 Ko |